Monsieur le Président, chers collègues,
Vous nous faites voter une énième délibération d’accompagnement à la mise en place de la ZFE qui encore une fois représente un pansement sur une jambe de bois. Après le pass petit rouleur, qui ne règle pas le problème du stationnement des véhicules qui ne disposent pas de garage individuels, après les cacahuètes pour les crit’air 4 et 5 voici des miettes pour les véhicules Crit Air 3.
Plutôt que d’avoir réfléchi, d’avoir anticipé des alternatives à la voiture, je rappelle que nous sommes au courant de la mise en place de la ZFE à Toulouse depuis 2015 tout de même, soit 8 ans, donc largement le temps de travailler à une offre de transport convenable, initier un RER toulousain, multiplier les lignes de bus en site propre, sécuriser les pistes cyclables, par exemple, ce sont juste des idées que je vous soumet au cas où. Hé bien plutôt que d’avoir réfléchi, vous n’avez rien fait. Et nous payons le prix de votre impréparation et de votre inconséquence depuis maintenant 2 mandats. Nous nous retrouvons dans une situation où vous demandez aux habitants de remplacer des voitures par d’autres voitures. Les habitantes et habitants de la métropole, dont ⅓ doit remplacer son véhicule d’ici janvier vous remercient, notre métropole est définitivement entre des mains dopées au goudron et à la route.
Alors j’anticipe déjà votre réponse culpabilisante: vous ne voulez pas protéger les habitants qui souffrent de la pollution, vous n’êtes pas écologistes! Vous ne voulez pas lutter contre la pollution atmosphérique. Bien entendu ce n’est pas le cas, et ces pauvres arguments ne trompent personne. s’il y a bien des personnes qui se soucient des habitantEs que vous délaissez depuis bien longtemps c’est bien nous. La mise en place de la ZFE est justement la conséquence de n’avoir jamais lutté contre la pollution.
Par votre inaction et par les miettes que vous donnez aux plus précaires vous les assignez à résidence, vous immobilisez une partie de la population. L’ultramobilité pour les plus aisés, l’immobilité pour les plus précaires, voila votre projet et celui du gouvernement que vous soutenez.
Je le rappelle : vouloir protéger la santé des habitants de la métropole toulousaine des émissions de gaz et particules polluantes est notre objectif.
Je voudrai insister sur trois aspects :
– La vignette Crit’Air est basée sur l’année de construction du véhicule, sans prendre en compte la cylindrée, le poids ou le malus écologique. C’est une aberration. La consommation d’énergie et la pollution sont impactées par le poids du véhicule et par son énergie grise de production, on le sait. Allez-vous vous positionner auprès de vos collègues du gouvernement ? Alors ça tombe bien, nous avons une ministre ici présente qui pourrait s’en saisir pour demander à ce qu’il y ait une refonte de la vignette et demander par exemple un malus sur les SUV de plus de 1300kg.
– Il est tout simplement impossible pour la plupart des personnes circulant dans cette zone d’acheter un véhicule récent, au coût trop élevé.
– Le système actuel des aides est un système trop complexe, qui concerne trop peu de monde et surtout le reste à charge demeure trop important.
Les aides actuelles ne permettent pas aux populations les plus précaires de changer de véhicule. L’entrée de gamme électrique avoisine les 24 000€ et le reste à charge est de 6 000€ pour les foyers les plus modestes, qui sont en dessous de 14 089€. En moyenne sur l’offre électrique le reste à charge est supérieur à 20 000€, toutes aides confondues.
Les aides que vous proposez sont insuffisantes ! Vous allez nous faire voter le fait que les personnes qui vivent avec 500 € par mois bénéficieront d’uniquement 500 € pour s’acheter un véhicule d’occasion crit’air 2, et c’est le seul qu’ils vont pouvoir se permettre, puisqu’avec des faibles revenus ils ne vont pas s’acheter un SUV flambant neuf. En gros, il faudrait qu’ils avancent un an de revenu pour changer de véhicule, pensez vous vraiment que cela est concevable ? Et bien sûr, ces personnes n’ont pas d’autre choix que de prendre la voiture vu la pauvreté de l’offre de transports en commun existant dans notre métropole.
Avec votre inaction, les ZFE vont juste agir comme une gentrification sous couvert d’écologie, qui va conduire à exclure les plus pauvres des villes. C’est pour ces raisons que la stratégie nationale et locale ne peut s’axer uniquement sur un renouvellement du parc automobile, qui sont un véritable cadeau à l’industrie automobile, financé avec l’argent public, plusieurs alternatives doivent être intégrées au déploiement des ZFE.
Telle qu’elle est conçue, la ZFE est donc une zone d’exclusion davantage qu’un bol d’oxygène dans notre agglomération.
Parce qu’elle est injuste et inefficace, particulièrement dans un contexte de contraction du pouvoir d’achat, nous vous demandons, M. le Président, de revoir votre copie, comme l’ont fait d’autres maires et présidents d’autres métropoles. Ouvrez une concertation permettant de trouver d’autres solutions, privilégiant notamment la densification du réseau de transport, les tarifs des déplacements, et les critères.