3.8 Quartier St Etienne – Hotel Lestang – Agathe
Je ne vais pas refaire la même intervention que la fois précédente sur le regret que j’éprouve, en tant que Toulousaine attachée à l’histoire de sa ville de vous voir vendre un hôtel particulier de l’âge d’or du pastel. Prétexter qu’une bâtisse historique est vétuste pour justifier sa vente relève du manque d’ambition pour la mise en valeur du patrimoine de notre ville. Le vendre c’est restreindre son accès.
Je voudrais plutôt ici m’adresser aux Toulousaines et aux Toulousains pour qu’ils prennent conscience de l’ampleur de la braderie patrimoniale à laquelle vous vous employez depuis que vous êtes à la tête de la ville, alors que vous vous revendiquez être un homme attaché à l’histoire de Toulouse et son patrimoine bâti.
Je vais donc rendre un funeste hommage à tous ces bâtiments auxquels les Toulousaines et les Toulousains n’ont plus accès, parce que vous avez préférez les vendre ou les détruire. Une sorte de visite guidée funèbre en somme.
Ci-gît donc, la caserne Vion des allées Charles de Fittes qui bénéficiait du label “Monument remarquable du XXe siècle”. Elle est mise en vente au plus offrant sans protection opposable à sa démolition, alors qu’elle constitue un chef d’oeuvre de Pierre Deveaux qui a d’ailleurs obtenu le prix Beshard pour cette construction
Ci-gît la prison Saint Michel, conçue par l’architecte toulousain Jacques-Jean Esquié en 1855, sous Napoléon III, exemple particulièrement marqué de l’architecture pénitentiaire de la fin du XIXe siècle avec sa magnifique structure en étoile, lieu de résistance lors de la Seconde Guerre Mondiale dont le futur s’assombrit peu à peu et alors que nombres d’habitants aimeraient que ce lieu devienne autre chose qu’un énième ensemble acquis par les grands promoteurs immobilier.
Ci-gît un autre lieu de résistance, au 17 chemin Lapujade, petite maison d’architecture ouvrière du début du XXe siècle. C’est un bout d’histoire populaire au coeur du faubourg Bonnefoy que vous avez décidé de raser. Elle a abrité les activités d’un groupe de francs-tireurs et partisans français (FTPF) dont Louis Taudou, durant la Seconde Guerre mondiale. Elle aurait très bien pu être conservée et valorisée à côté du jardin Lapujade.
Ci-gît la maison d’un autre faubourg, vers St Cyprien, un cas parmi tant d’autres, une maison de style régionaliste construite en 1927, rue de Cugnaux, dont le permis de démolir avait été refusé en 2012 par la Métropole au motif de son intérêt en tant que maison de faubourg soignée, non dénaturée, qui méritait d’être conservée et qui dont vous avez finalement autorisé la destruction en 2019.
Ci-gît la maison de maître du second empire, à Pourvourville, chemin des Clotasses. L’ancienne ferme, comprenant la maison de maître et ses dépendances et le petit bois, rasée, 18 arbres abattus, pour céder la place à la résidence et à son parking souterrain de 150 places.
Ci-git la villa atelier de l’architecte toulousain Louis Cazelles, typique de l’architecture moderniste et régionale de l’après-guerre, allées de Barcelone, Elle a été démolie en 2019. Pourtant, elle avait fait l’objet d’une alerte en règle auprès des services de l’urbanisme de la part d’une association, Parcours d’Architecture. Mais, le permis de démolir a finalement été accordé.
Ci-gît le projet de La Grave, sacrifiée pour un projet immobilier. Lieu emblématique de Toulouse, il représente, selon le codev, mais pas que une opportunité exceptionnelle pour l’évolution de l’hypercentre historique: avant d’accorder un permis de construire à un promoteur, il aurait pu, je cite encore le codev, “être opportun de se donner le temps de la réflexion en construisant avec les partenaires publics et privés, les associations et les habitants un projet transitoire qui aurait servi d’expérimentation pour le projet global de ce site.”
Heureusement, certains lieux ont été sauvés, je pense à l’usine JOB, des fameux papiers à cigarettes de Jean Bardou, aux Sept Deniers, rescapée grâce à une mobilisation citoyenne. D’autres, et ce sera certainement le cas de l’hôtel de Lestang, ont été sauvés mais ne sont plus accessibles aux habitants, telle la maison du Verrier du quartier Arnaud Bernard, qui a été restaurée grâce à des aides substantielles de la Drac pour accueillir…. des logements de luxe.
Et je n’évoque pas ici toutes les questions posées sur les fouilles archéologiques non réalisées ou les destructions de vestiges qui ont pu être réalisées par le passé.
Monsieur Moudenc, si vous êtes vraiment attaché à notre patrimoine commun, prenez réellement en compte le rapport du Codev sur la gestion du patrimoine. Brader son patrimoine pluricentenaire ne peut se justifier que par des arguments bassement comptables. La destruction de notre patrimoine, ou sa privatisation empêchent les Toulousaines et les Toulousains d’accéder à leur passé, vous n’en avez pas la propriété, respectez le.