10.2 Réhabilitation 2023-2026 du parc locatif social : approbation des nouvelles modalités d’intervention – DEL-23-0215
Monsieur le président, chers collègues,
Comme vous l’indiquez, le bâtiment est le deuxième plus gros consommateur d’énergie, pour 45%, et le deuxième secteur émetteur de gaz à effet de serre, pour 23%, après la mobilité. Il y a donc un enjeu majeur à isoler les bâtiments et à maîtriser les consommations d’énergie en hiver mais aussi celles de l’été avec l’accroissement des canicules. Il y a d’ailleurs aussi un enjeu à construire différemment pour assurer le confort d’été non pas avec de la climatisation mais bien en assurant une ventilation naturelle. Donc nous ne pouvons qu’être en faveur de mesures permettant la réhabilitation du parc locatif social et nous regrettons d’ailleurs que la métropole n’ait pas participé à la massification de la réhabilitation ce qui nous aurait permis de réduire davantage les gaz à effet de serre et ce qui aurait pu permettre, avec une vraie politique de transport, d’éviter la ZFE.
Ceci étant dit, nous avons 3 problématiques :
- La fiabilité des diagnostics énergétiques
- La conformité des travaux de rénovation énergétique
- L’absence de mesures conduisant à utiliser des isolants de bonne qualité et biosourcés
Comme la presse l’a rapporté à plusieurs reprises, et comme l’ont montré des enquêtes de terrain, un même bien peut se voir attribuer une étiquette énergétique différente pour chaque diagnostiqueur.
Alors que le financement des travaux de rénovation thermique est conditionné à des indicateurs de performances énergétiques, « la vérification après travaux de la bonne atteinte de ces objectifs est rare ». Peu de bailleurs sont dotés d’instruments leur permettant de mesurer les consommations réelles au-delà des chiffrages théoriques », relève le rapport qu’a publié, à l’été 2022, l’Agence Nationale de Contrôle du Logement Social.
Dans un logement sur dix, aucun diagnostic de performance énergétique n’a été fait après rénovation, s’étonnent ainsi les rapporteurs.
En l’absence de cadrage précis, les bailleurs ont aussi tendance à faire passer pour des travaux de rénovation thermique de simples travaux de gros entretien, ayant un faible impact sur les performances énergétiques des logements.
De plus, après l’été caniculaire que nous avons passé, qui a causé des morts, parce que de trop nombreux logements sont devenus insupportables à vivre sans climatisation, la question du confort d’été reste un impensé pour les bailleurs alors que le dérèglement climatique nous impose pourtant de nous en préoccuper au moins autant que des températures hivernales.
L’autre problématique, c’est l’absence de contrôle réel de la conformité des travaux de rénovation énergétique. On reste sur des performances énergétiques mesurées de manière virtuelle. Il n’y a pas de réel contrôle ni d’organisation qui permettent de s’assurer d’un diagnostic de départ avant rénovation et d’un diagnostic final afin d’objectiver la réalité de la performance de la rénovation et c’est là aussi où le bât blesse comme le souligne le magazine 60 Millions de Consommateurs qui demande une meilleure formation des diagnostiqueurs de performance énergétique et qui, après en avoir testé plusieurs sur plusieurs bâtiments, a constaté des écarts substantiels d’un professionnels à l’autre. En effet, les DPE réalisées comportent des erreurs en pagaille.
En outre, il y a la qualité générale des travaux dans le bâtiment avec de plus en plus de malfaçons. Nous avions d’ailleurs dénoncé il y a 2 ans la situation sur une des cités de Négreneys où les habitants avaient dénoncé des poses de double vitrage tellement mal réalisées qu’il y avait des espaces énormes autour de la fenêtre et donc plutôt une aggravation de l’isolation qu’une amélioration.
Il est légitime que la collectivité aide les bailleurs sociaux à rénover un parc de logement social qui a pris beaucoup de retard dans ce domaine. Il est aussi essentiel que la collectivité s’assure que l’agent public est bien dépensé, et donc qu’elle assure un minimum de contrôles pour, à partir de diagnostics fiables de l’étiquette énergétique avant et après rénovation, s’assurer d’un réel gain de performance énergétique. Et pas uniquement sur le papier. Il pourrait tout à fait y avoir des vérifications aléatoires d’un certain nombre de réalisations.
Le dernier point, concerne la qualité des isolants utilisés. Aujourd’hui, les isolants biosourcés et/ou écologiques sont considérés comme les plus efficaces, notamment contre la canicule. La laine de bois possède par exemple un déphasage de 15h, été comme hiver c’est un excellent isolant. Ensuite, le liège, la laine de coton ou encore la ouate de cellulose figurent parmi les meilleurs isolants. Ils contribuent à l’inertie thermique du logement qui permet de conserver la fraîcheur ou la chaleur. Les produits biosourcés ont plusieurs intérêts : renouvelabilité, stockage de CO2, transformation et fabrication demandant peu d’énergie, potentiel de production locale limitant les distances de transport, maintien ou création d’emplois locaux et ruraux…
Il nous semble donc essentiel que la métropole veille à ce que l’argent public soit utilisé pour des rénovations de qualité et qui soient bénéfiques pour le territoire et l’environnement. Si je peux paraître prendre un ton un peu professoral sur le sujet ce n’est pas à l’attention des services qui généralement maîtrisent tous ces sujets, mais c’est davantage à l’attention de mes collègues élus. Les solutions existent et il nous faut donc nous emparer de ces solutions pour construire un avenir désirable. Nous devons là aussi faire des choix de société : mettre l’argent public au service des habitants et de l’habitabilité de nos villes, ou continuer à faire des travaux au rabais pour les pauvres sans se préoccuper de l’impact environnemental de nos décisions politiques.